Le rapport annuel du Haut Conseil pour le climat vient de paraître, sous le titre « Tenir le cap de la décarbonation, protéger la population ». S’il met en avant les bons résultats de la France en matière d’émissions de gaz à effet de serre sur l’année 2023, signe d’un réel effort pour la lutte contre le réchauffement climatique, il déplore toutefois la lenteur de la politique climatique et le manque de cohérence de certaines stratégies mises en œuvre.
Vagues de chaleurchaleur dramatiques dans de nombreuses régions du globe, événements météorologiques de plus en plus extrêmes, sécheresses qui mettent à mal la production agricole, appauvrissement de la ressource en eau potable, feux de forêts… C’est un fait, les populations sont de plus en plus impactées et directement menacées par les conséquences du réchauffement climatique. Pour lutter contre, une seule solution : décarboner notre économie. Malheureusement, les chiffres récents montrent que la tendance globale est à la hausse des émissions de CO2. Face à cette sinistre évolution, il est urgent d’accélérer nos actions en faveur du climat et de renforcer encore plus notre politique climatique. La France a certainement un rôle important à jouer dans cette dynamique et se doit d’ouvrir la voie à cette décarbonation.
Notre pays peut d’ailleurs se targuer de ses bons résultats en matièrematière de réduction des émissionsémissions des gaz à effet de serre. En 2023, c’était ainsi la première fois qu’une baisse significative était enregistrée sur le territoire, laissant espérer que les objectifs fixés pour 2030 soient tenus. Reste à tenir le cap. Dans le contexte politique houleux que nous connaissons actuellement, rien n’est cependant moins sûr.
Une action publique bien trop lente
Le dernier rapport du Haut Conseil pour le climat met ainsi en garde contre tout relâchement politique face à l’objectif de la neutralité carboneneutralité carbone, initialement prévue pour 2050. Car l’enjeu est majeur : il s’agit avant tout de protéger les populations. Or, plus le temps passe, plus la situation s’aggrave et plus les conséquences sur les sociétés seront lourdes, avec un coût pour l’État de plus en plus élevé. Oui, car si la mise en œuvre d’une politique de décarbonation a un prix, le réchauffement climatique en a également un, et il est bien plus élevé. InondationsInondations, sécheresses, épidémiesépidémies, caniculescanicules…, toutes ces catastrophes de plus en plus fréquentes représentent un coût important pour les États. Le rapport alerte d’ailleurs sur l’augmentation des inégalités qu’engendre la multiplication de ces événements, par l’augmentation des assurances par exemple, ou encore les tensions dans les services de santé.
Si l’on peut se réjouir de l’institutionnalisation progressive des mesures de lutte contre le réchauffement climatique, les membres du Haut Conseil pour le climat déplorent cependant la lenteur des réponses et de la mise en œuvre des mesures pour faire face aux impacts du changement climatique. L’intensification des aléas climatiques nécessiterait en effet une bien plus grande réactivité et la mise en œuvre de mesures fortes. La lenteur des processus d’actions publiques est en décalage critique avec l’urgence de la situation.
Un recul de l’engagement climatique dans le secteur de l’agriculture
Signe que les efforts payent, pour 2023, la baisse des émissions brutes attribuable aux politiques publiques climatiques est estimée à 15,3 millions de tonnes équivalent CO2, par rapport à 2022. Bonne nouvelle, tous les grands secteurs sont concernés par cette baisse. Attention cependant à ne pas nous reposer sur nos laurierslauriers, car il existe de nombreux points noirs. En premier lieu, il apparaît que l’empreinte carbone de la France (9,2 tonnes équivalent CO2 par personne) est plus élevée que la moyenne mondiale (6,8 t éq.CO2)). Un mauvais chiffre lié au fait que nous importons beaucoup de produits ayant une forte empreinte carbone. Ce budget souffre également de l’affaiblissement des puits de carbonepuits de carbone, notamment celui que représentent les forêts. De plus, si certains secteurs comme les transports ont entamé clairement une trajectoire de décarbonation, d’autres ont encore du mal à se mettre sur les rails. C’est le cas notamment de l’agricultureagriculture. Ce secteur peine en effet à trouver l’équilibre entre politiques alimentaires, sanitaires, environnementales et climatiques. Depuis un an, le secteur est ainsi marqué par un net recul de l’action publique climatique.
Il reste malheureusement verrouillé sur des modèles intensifs en matière d’émissions alors qu’il faudrait urgemment se diriger vers des solutions bas-carbone. Les agriculteurs sont pourtant en premières lignes face aux effets du changement climatique. Le rapport du Haut Conseil pour le climat déplore ainsi que l’action publique ne repose principalement que sur l’information des consommateurs et donc sur des approches volontaires et individuelles.
Un manque de cohérence et de stabilité dans le temps
De manière générale, si la plupart des secteurs s’appliquent à mettre en œuvre des stratégies pour s’adapter au changement climatique et aller vers la décarbonation, ils soufrent tous du manque de visibilité et de stabilité des politiques publiques. La stratégie énergétique pâtit ainsi d’un manque de cohérence à cause des divergences politiques qui s’expriment à chaque changement de gouvernance.
Il est certain que l’objectif de la neutralité carbone, qui est visée par la France, mais également par l’ensemble de l’Europe, dépend essentiellement des volontés des acteurs politiques en place ou à venir et de leur engagement en faveur du climat. Une cohérence sur le long terme est absolument essentielle face à l’urgence de la situation. Des actions renforcées et plus rapides seraient nécessaires pour assurer la protection de la population face aux aléas induits par le réchauffement climatique.