La mission réussie de Starship 4 décryptée par un expert

Quelle mission ! Lors de son quatrième vol d’essai, le Starship de SpaceXSpaceX a réalisé une mission de démonstration quasiment parfaite, montrant une maîtrise technique remarquable à chaque étape de la mission. Du décollage à la séparationséparation des étages, du vol balistique à la rentrée atmosphérique, sans oublier la phase d’atterrissage des deux parties du véhicule spatial, chaque étape s’est déroulée avec succès malgré quelques problèmes rencontrés au cours du vol, probablement sans conséquences sur le développement du véhicule.

Notez que cette analyse du vol enthousiaste se base sur l’interprétation des images de la mission. Nous n’avons aucun compte rendu du vol, juste ces données visuelles et quelques informations diffusées par SpaceX lors de la retransmission, qui pourraient tout à fait être contredites dans les jours qui viennent.

Pour Christophe Bonnal, expert sénior à l’Académie de l’Air et de l’Espace, « SpaceX semble avoir résolu quasiment tous les problèmes identifiés lors des essais précédents ». Il est en effet remarquable de constater à « quelle vitesse SpaceX a pu résoudre la plupart des problèmes identifiés lors des essais précédents du Starship », qui rappelons-le se sont tous terminés par l’explosion des deux véhicules, premier étage Super Heavy et second étage Starship.

Le développement par des prises de risque assumées  

À ce sujet, il est important de rappeler que SpaceX « considère ces échecs comme un coût acceptable dans sa stratégie de développement qui repose sur des vols de qualification successifs avec des prises de risque assumées » plus tôt, comme c’est le cas avec Ariane 6Ariane 6 par exemple, dont le « développement repose et se concentre sur la qualification du lanceur en conditions au sol, avant son premier vol ».

Après ce quatrième vol, et malgré un vol réussi, malgré la perte de deux moteurs, l’un au décollage, l’autre lors du retour, « tous deux compensés efficacement grâce aux autres moteurs en fonctionnement ». Les différentes phases telles que la séparation, le retournement, le retour et le freinage de l’étage se sont déroulées de manière apparemment nominale. L’étage principal Super Heavy n’est pas encore qualifié, bien qu’il ait « rempli les objectifs qui lui étaient assignés ». Pour le qualifier il faudrait pour cela « l’avoir récupéré dans Mechazilla, et le faire revoler : on en est encore loin… ».

En images : les Starship qui voleront en 2024 sont prêts

Quant à « l’atterrissage » réussi dans l’océan, il sera nécessaire de vérifier le « niveau de précision car il s’agit d’un critère essentiel ». En effet, contrairement à l’étage principal du Falcon 9, le Super Heavy qui ne dispose pas de jambes d’atterrissage « devra viser un atterrissage de précision au mètre près ! ». Il sera récupéré par la tour de lancement, à quelques mètres du sol, par deux bras mécaniques baptisés Mechazilla qui peuvent se refermer ou s’ouvrir à différentes altitudes. Ils seront utilisés comme « étaux » pour attraper l’étage Super Heavy avant qu’il ne touche la terre ferme et le tenir à quelques mètres du sol.

Une rentrée atmosphérique plus chaude que prévu

Quant au véhicule spatial Starship, « sa mission jusqu’à 213 kilomètres d’altitude s’est déroulée de manière satisfaisante ». Lors de la phase balistique qui s’est ensuivie, un « black-out d’une vingtaine de minutes imprévu, que l’on n’avait pas eu sur le troisième vol ». Cela pourrait s’expliquer pour cacher des essais pendant la phase balistique, mais cela reste au conditionnel. On ne sait donc pas si SpaceX a mis à profit cette phase balistique pour réaliser différents tests ou manœuvres spécifiques. On peut supposer qu’il a « essayé de faire des reallumages de moteurs Raptor en microgravité, et peut-être même tester l’ouverture d’une trappe pour simuler l’ouverture de la soute ».

Le retour dans l’atmosphèreatmosphère du Starship a été d’une très grande stabilité, ce qui a « agréablement surpris » Christophe Bonnal qui « ne s’attendait pas à un tel comportement en vol, en considérant les problèmes qui avaient été notés pendant le vol précédent ». Cependant, les « contraintes thermiques induites lors de la rentrée atmosphérique ont été bien plus fortes que prévu, particulièrement entre entre 50 et 65 kilomètres daltitude ». Elles ont entraîné des dommages sur le véhicule, tels que des tuilestuiles arrachées, dont certaines s’étaient détachées dès le décollage, ou un flap partiellement fondu mais fonctionnel. Ces incidents ne sont « évidemment pas de nature à ralentir le développement du Starship ». Aujourd’hui, on sait « dimensionner la protection thermique des véhicules spatiaux quelles que soient les contraintes thermiques, donc les équipes de Musk devraient savoir corriger cela d’ici au prochain vol ». Enfin, la rentrée à plat du Starship s’est terminée par la manœuvre dite belly flop qui « permet au Starship de se redresser verticalement avant d’atterrir ».

Orbite terrestre pour le cinquième vol du Starship

Pour son prochain vol d’essai qui pourrait avoir lieu d’ici un mois, « SpaceX pourrait amener le Starship en orbiteorbite ». Cette manœuvre nécessiterait « d’allumer les moteurs du véhicule spatial à son point le plus élevé pour circulariser son orbite autour de la Terre, puis de les rallumer de nouveau pour se désorbiter et amorcer une phase de rentrée atmosphérique ». Ces manœuvres orbitalesorbitales complexes, nécessitant une parfaite maîtrise du mouvementmouvement des ergolsergols en apesanteurapesanteur et un rallumage des moteurs du Starship « entraîneraient une rentrée atmosphérique à une vitesse d’environ 27 000 kilomètres par heure ».


Ne manquez pas le quatrième vol d’essai du Starship qui devrait réussir !

Article de Remy Decourt, publié le 06/06/2024

Quelques jours après l’annonce par le milliardaire japonais Yusaku Maezawa de l’annulation de son voyage autour de la LuneLune à bord d’un Starship, SpaceX se prépare pour le quatrième vol d’essai de ce véhicule spatial qui pourrait être couronné de succès. Rendez-vous est pris ce jeudi.

La détermination inébranlable de SpaceX et d’Elon MuskElon Musk demeure intacte. Sous réserve de l’obtention de l’autorisation de la FAA (Federal Aviation Administration)), l’agence américaine chargée de réguler les activités des vols spatiaux privés, SpaceX se prépare pour le quatrième vol d’essai du Starship, moins de trois mois après le troisième vol d’essai du Starship.

Comparativement aux deux premiers échecs, qui ont entraîné des dégâts significatifs, le dernier échec a été moins problématique du point de vue de la FAA en raison de divers éléments, comme le fait qu’aucun système automatique de sécurité du véhicule n’a été activé en vol et qu’aucun débris n’a impacté des zones en dehors des zones dangereuses prédéterminées.

Jusqu’à présent, le Starship a réalisé trois vols d’essai, en avril 2023, en novembre 2023 et le 14 mars 2024. Bien que chaque vol successif ait montré des avancées significatives, ils se sont tous terminés par la perte des deux étages du Starship, à savoir le Super Heavy et l’étage supérieur Starship. Néanmoins, le troisième vol a été celui qui a affiché le plus de réussites sur le plan des démonstrations technologiques, telles que le transfert de carburant en vol, l’ouverture en vol de la soute, et par exemple, la relance des moteurs de l’étage supérieur.

Démontrer avec ce 4e vol que la récupération des deux étages est possible

Pour ce quatrième vol, SpaceX se concentrera sur la transition de la mise en orbite à la démonstration de la capacité de retour et de la réutilisation du Starship et de Super Heavy. La trajectoire de vol sera similaire à celle du test précédent, au cours duquel le vaisseau avait parcouru la moitié du globe terrestre avant de se désintégrer en rentrant dans l’atmosphère. Cette fois, SpaceX veut réaliser un amerrissage en douceur du Super Heavy dans le golfe du Mexique et une rentrée contrôlée de Starship dans l’atmosphère.

Méthodes de développement différentes

Cette stratégie de développement diffère de celle d’Ariane 6 qui repose sur la qualification du lanceurlanceur en conditions au sol, avant son premier vol prévu en juillet. Concrètement, avant le vol inaugural d’Ariane 6, tous les composants et sous-systèmes sont minutieusement testés, validés et modélisés, couvrant chaque phase du vol, ainsi qu’à travers une série d’essais approfondis sur l’ensemble des éléments du lanceur, y compris des essais combinés. Ce processus prend du temps, mais garantit une approche rigoureuse qui qualifie le lanceur avant son premier vol.

Décollage imminent d’Ariane 6 : les enjeux et les problématiques du nouveau lanceur avec Toni Tolker-Nielsen

À contrario, chez SpaceX, la stratégie de qualification du lanceur est basée sur des vols de qualification, ce qui signifie que des lancements réels sont effectués pour tester le fonctionnement du lanceur dans des conditions réelles. Lorsque des échecs surviennent, SpaceX utilise ces incidents pour analyser les problèmes rencontrés, identifier les failles et apporter des améliorations pour renforcer la fiabilité du lanceur. En apprenant des erreurs et en tirant des leçons des échecs, SpaceX vise à optimiser la performance et la sécurité de ses lanceurs au fil des essais. Cette approche permet à SpaceX de progresser de manière itérative en mettant l’accent sur l’apprentissage continu et l’innovation pour améliorer constamment ses systèmes de lancement.

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