En 2020, la Chine et la Russie annoncent la création d’un programme de base lunaire internationale et proposent de l’ouvrir au monde entier, en concurrence avec le programme lunaire américain qui rassemble beaucoup de partenaires. Mais qui a rejoint la Chine et la Russie aujourd’hui et pourquoi ?
Annoncé en 2020, le programme de base internationale de recherche sur la Lune ILRS est entériné le 9 mars 2021 par la Chine et la Russie. C’est la suite du programme lunaire habité de l’agence spatiale chinoise, après que des astronautes chinois foulent le sol sélène pour la première fois, ce qui est prévu d’ici la fin de la décennie.
Prévu d’être installé au pôle Sud, le projet ILRS est en concurrence avec le programme Artemis américain. Les deux programmes cherchent à rassembler les autres puissances spatiales du monde entier. Qui a rejoint le girongiron chinois ?
La Russie, en deçà de toute espérance
Principal partenaire de l’ILRS, la Russie est en difficulté avec son programme lunaire. La principale raison est que le spatial russe est lourdement impacté par la guerre en Ukraine. Les financements sont surtout orientés vers le volet défense, bien moins dans l’exploration. Une fois la Station spatiale internationale (ISS) désorbitée, la Russie doit disposer de sa propre station nommée Ross, mais le projet manque de fonds et est sans cesse reporté.
Le spatial russe est toutefois d’un grand secours pour l’ILRS en raison de son expérience passée dans l’exploration lunaire. La Russie a déjà fourni plusieurs fois à des missions lunaires chinoises les systèmes d’alimentation d’électricité et de chaleur par radio-isotope (RTG) à la mission Chang’e 4mission Chang’e 4, grâce auxquels la sonde survit à la longue nuit lunaire depuis bientôt six ans sur la face cachée.
Mais à la différence du sans-faute sur sept missions lunaires chinoises, le retour de la Russie sur la Lune avec Luna 25 s’est soldé par un crash après un problème technique lors des manœuvres de mise en orbite lunaire. Plus de 45 ans se sont écoulés depuis la dernière mission soviétique sur la Lune. La Russie doit beaucoup réapprendre.
Quand la géopolitique se transpose sur la Lune
Outre la Russie, la Chine compte douze pays partenaires du programme ILRS. Une partie d’entre eux sont déjà des partenaires de la Chine ou de la Russie dans d’autres projets spatiaux, ou au-delà :
- Biélorussie : petite puissance spatiale européenne, partenaire historique du spatial russe et pays ami de Vladimir Poutine ;
- Serbie : puissance des Balkans qui a toujours eu des liens avec la Russie ;
- Azerbaïdjan : petite puissance spatiale asiatique, proche de la Russie et hôte du Congrès international d’astronautiqueastronautique (IAC) de 2023 ;
- Kazakhstan : partenaire historique du spatial russe car hôte de la base de BaïkonourBaïkonour, d’où partent les astronautes en vaisseau SoyouzSoyouz ;
- Pakistan : partenaire important du spatial chinois. Possiblement un des premiers pays étrangers à envoyer un astronaute dans la station spatiale chinoisestation spatiale chinoise ;
- Turquie : puissance spatiale importante qui joue sur les deux tableaux (membre de l’Otan et aussi partenaire de la Russie) ;
- Thaïlande : puissance spatiale émergente d’Asie, en bonnes relations avec la Chine et la Russie ;
- Venezuela : partenaire historique de la Russie et de la Chine ;
- Nicaragua : nouveau partenaire de la Chine qui a revu sa position sur Taïwan en 2021, soutien de la Russie dans la guerre en Ukraine.
Il est difficile de savoir ce que vont apporter ces partenaires à l’ILRS. Il est clair que plusieurs d’entre eux ont rejoint le programme pour se positionner géopolitiquement face au leadership américain. De leur côté, les accords Artemisaccords Artemis proposés par les États-Unis comptent plus d’une quarantaine de pays signataires, dont l’Inde, le Japon, et la plupart des Européens.
L’Afrique spatiale, à l’affût des opportunités
Le spatial africain est en plein développement. La Chine, la Russie et les États-Unis sont en pleine opération de séduction. Puissances spatiales africaines de premier plan, le Rwanda, l’Angola et le Nigéria ont signé les accords Artemis, trois autres ont rejoint le giron chinois :
- Afrique du Sud : a rejoint l’ILRS comme nouveau membre de l’alliance des BRICS dynamisée par la Chine et la Russie pour faire face à la domination américaine. L’Afrique du Sud est une puissance spatiale importante dans le continent ;
- Égypte : puissance spatiale parmi les plus importantes en Afrique. Longtemps en relation avec le spatial européen, l’Égypte est devenu un partenaire de premier plan de la Chine. Il existe même une institution en Égypte dédiée à cela ;
- Sénégal : puissance spatiale montante d’Afrique de l’Ouest qui a surpris du monde en annonçant rejoindre l’ILRS seulement quelques jours après avoir lancé son premier satellite développé avec le soutien de la France.
D’autres pays d’Afrique pourraient rejoindre l’ILRS, comme le Niger, le Burkina Faso et le Mali, qui discutent actuellement avec l’agence spatiale russe en vue de nouveaux partenariats. Les trois pays sont contrôlés par des juntes militaires arrivées au pouvoir avec le soutien des milices du groupe russe Wagner.
Enfin, l’ILRS compte également des partenaires non gouvernementaux dans le monde, comme des institutions privées, ou des associations.
Une fois de plus, difficile de savoir ce qu’ils pourraient apporter à la constructionconstruction d’une base lunaire à part son caractère international.