On dit depuis presque un demi-siècle que la bande dessinée (BD) est un neuvième art. Le regretté Michel Serres expliquait souvent que l’œuvre d’Hergé en faisait le Jules Verne du XXe siècle et que les aventures de Tintin n’était pas sans rappeler les voyages extraordinaires inspirés par les sciences et l’exploration du monde au XIXe siècle.
Nous sommes au XXIe siècle, c’est tout naturellement que la bande dessinée peut prendre une nouvelle dimension et relever de nouveaux défis suite à notre exploration du Système solaire et aux perspectives de l’exobiologie. Un scénariste, essayiste et directeur littéraire, Bruno Lecigne, ayant travaillé rien de moins qu’avec Mœbius, Gimenez et même Jodorowsky, a donc collaboré avec plusieurs dessinateurs, comme Fabien Bedouel, auteur-dessinateur diplômé en animation de l’École nationale supérieure des arts décoratifs (ENSAD), pour relever le gant.
Il en a résulté une série de BD faisant partie de ce que l’on appelle la hard science-fiction (dite aussi hard science, hard SF, SF dure), un genre de science-fiction dans lequel les technologies telles qu’elles sont décrites peuvent être considérées comme vraisemblables au regard de l’état des connaissances scientifiques. Trois tomes ont déjà été publiés aux éditions Glénat, les suivants devant être disponibles dans les années à venir. Ils mettent en scène un voyage dans le Système solaire, chaque tome étant consacré à l’une des planètes principales de Mercure à Neptune, mais sans la Terre, et avec un 8e et dernier tome dédié au Soleil et qu’il est prévu de rendre public en 2027.
Les ouvrages consacrés à Mars, puis Jupiter et tout dernièrement Saturne sont donc déjà disponibles et ils ont la particularité d’avoir bénéficié des connaissances apportées par un comité scientifique, composé d’astrophysiciens et astrophysiciennes à l’Observatoire de Paris – Université Paris Sciences et Lettres.
Une odyssée scientifique façon « blockbuster hollywoodien »
Tout comme dans la mythique série des Il était une fois l’espace, chaque ouvrage ne raconte pas seulement l’odyssée à la manière d’un « blockbuster hollywoodien » d’une équipe de scientifiques dans le monde des planètes du Système solaire façon Mission to Mars ou encore Seul sur Mars, mais est l’occasion pour les lecteurs de 7 à 77 ans d’apprendre beaucoup de choses sur ces planètes et de répondre à plusieurs questions qu’ils pourraient se poser.
Que se passerait-il si l’on envoyait des astronautes dans l’atmosphère de Jupiter ? Peut-on trouver de la vie sur l’une de ses lunes ? Quelle est l’origine du grand canyon sur Mars ? S’agit-il bien d’un canyon d’ailleurs ? Comment s’est formé le Système solaire et a-t-il toujours eu l’aspect que nous connaissons aujourd’hui ?
C’est donc un vrai documentaire ludique sur notre connaissance du monde des planètes qui se déploie dans chaque album avec l’assurance que son contenu scientifique soit rigoureusement exact et à jour sur nos connaissances en planétologie grâce aux chercheurs de l’Observatoire de Paris. Chaque album se termine d’ailleurs un peu à la façon des épisodes des Mystérieuses Citées d’or, c’est-à-dire par un exposé digne d’une petite encyclopédie et mené de main de maître par ces mêmes chercheurs.
On peut ainsi en apprendre plus sur l’histoire de l’exploration de Mars, les caractéristiques de son intérieur ou de son atmosphère, les anneaux de Saturne et ses lunes, comme Titan et Encelade, etc.
Il est important par contre de bien lire les albums dans l’ordre de leur parution afin de bien comprendre l’intrigue et de ne pas spolier les événements qui la composent.
Le film Mission to Mars donne une idée de ce que donnerait l’adaptation de la série BD au cinéma. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l’écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © Touchstone Pictures
Dans les pas d’Arthur Clarke dans le Système solaire
On peut tout de même dire que la série commence par de multiples clins d’œil à Arthur Clarke avec notamment ses célèbres romans 2001 : l’Odyssée de l’espace et Rendez-vous avec Rama. L’Humanité découvre ainsi lors d’une des missions Artemis un vaisseau géant allongé évoquant peut-être le fameux objet interstellaire ‘Oumuamua dont certains se sont demandé s’il ne s’agissait pas d’une sonde interstellaire E.T. Dans le cas de la BD, il s’agit bien d’un vaisseau extraterrestre naufragé depuis 2 000 ans au moins sur la face cachée de la Lune.
On y découvre un équipage décédé… ou presque. Il reste un humanoïde vivant dans une sorte de caisson d’hibernation qui a été épargné par le crash du vaisseau et qui finit par expliquer qu’il conserve d’une certaine façon la mémoire de ses congénères disparus puisque ceux de son espèce forment une sorte d’esprit collectif.
Il est nommé Clarke par l’espèce humaine.
Clarke semble bienveillant et il propose pour remercier ses sauveteurs de leur faire visiter le Système solaire avec son vaisseau finalement très peu endommagé et dont la propulsion est si avancée qu’ils peuvent rejoindre Mars en un rien de temps. Mais au fur et à mesure du voyage, des doutes naissent. Clarke est-il aussi bienveillant qu’il y paraît ? Même en tenant compte du fait qu’il y a un écart entre la psyché humaine et celle de l’espèce représentée par Clarke, n’a-t-il pas un agenda secret qui à terme est une menace pour l’Humanité ?
Pour le savoir, embarquez donc à bord du vaisseau de Clarke avec ses six Homo sapiens, français, états-uniens, italiens ou chinois.
Article rédigé en partenariat avec les Editions Glénat