Comment expliquer l’exceptionnelle préservation des fossiles de dinosaures et mammifères de la formation Yixian, en Chine, qui nous renvoie directement à un riche écosystème du Crétacé ? Si l’on pensait jusqu’à présent que des épisodes volcaniques dramatiques étaient en cause, une nouvelle étude nous révèle que l’explication pourrait être bien moins catastrophique.
On l’appelle la « Pompéi chinoise ». Situé dans le nord-est de la Chine, ce site paléontologique d’exception renferme en effet une massemasse incroyable de fossiles datant du Crétacé inférieur (entre 120 et 130 millions d’années), présentant un état de conservation tout à fait remarquable.
Depuis les années 1990, ce sont en effet de nombreux fossiles de dinosaures, d’oiseaux, d’insectes, de tortues, de grenouilles et de mammifèresmammifères qui ont été extraits de la formation Yixian, certains possédant des restes de peau, d’organes ou de plumes fossilisés. Nombre des spécimens retrouvés sur le site sont ainsi devenus des éléments paléontologiques de référence d’une grande valeur scientifique. C’est d’ailleurs là que le premier dinosaure non aviendinosaure non avien possédant des plumes a été identifié. La qualité de préservation des plumes était d’ailleurs si élevée que les scientifiques ont pu en identifier les couleurs originelles !
Mais comment expliquer une si incroyable conservation des fossiles ?
La fossilisation, un processus pas si évident à réaliser
Pour rappel, la fossilisationfossilisation est un processus relativement difficile à réaliser et nécessite des conditions bien particulières pour éviter que l’ensemble du corps ne soit rapidement décomposé. Par rapport au nombre de dinosaures morts, seule une infime fraction a vu ainsi ses restes préservés par un processus de minéralisation, permettant à ces ossements de traverser les dizaines, voire centaines de millions d’années.
Il faut généralement que le corps soit rapidement enfoui après la mort de l’animal et que les conditions du milieu soient anoxiquesanoxiques, c’est-à-dire très pauvre en oxygène. L’environnement doit ensuite rester stable sur le très long terme pour permettre la complétion du processus de minéralisation. Certains environnements sont donc plus propices à produire des fossiles de bonne qualité : lorsque l’animal est tombé dans une lagune par exemple et a rapidement été recouvert par des sédimentssédiments, lorsque le corps a été charrié lors d’une crue et recouvert d’une forte épaisseur de boue, ou encore lorsqu’il a été rapidement enfoui sous les cendres lors d’une éruption volcaniqueéruption volcanique.
Des scènes de vie figées qui rappellent la catastrophe de Pompéi
La qualité des fossiles de la formation Yixian a d’ailleurs poussé les scientifiques à suspecter que des épisodes volcaniques violents et soudains soit à leur origine. Un peu à l’image de la catastrophe qui ravagea Pompéi en l’an 79. L’argument principal supportant cette idée était la présence de nombreux squelettes parfaitement articulés formés en environnement continental, comme cette scène fossilisée d’un combat entre un mammifère et un petit dinosaure, qui semble avoir été pétrifiée sur l’instant. Plusieurs événements catastrophiques de ce type se seraient ainsi produits sur une période d’environ 1 million d’années, donnant naissance à ce site fossilifèresite fossilifère extrêmement riche.
Pas de catastrophe, mais des morts banales dans un environnement propice
Pourtant, une nouvelle étude publiée dans la revue PNAS est venue contredire cette hypothèse qui s’était solidement ancrée ces dernières années. L’équipe menée par Scott MacLennan de l’Université de Witwatersrand en Afrique du Sud a en effet réalisé une datation détaillée des différents fossiles à partir des grains de zirconzircon trouvés dans les sédiments les ayant englobés. La datation de ces minérauxminéraux a révélé que les fossiles dataient ainsi systématiquement de 125,8 millions d’années et que les divers animaux étaient morts sur une période s’étalant sur 93 000 ans. Et que sur toute cette période, rien de catastrophique ne s’était en réalité produit !
L’étude révèle par contre que le climatclimat était alors particulièrement humide dans cette région du monde. Des conditions qui auraient drainé de grandes quantités de sédiments dans le fond des lacs, ensevelissant rapidement les organismes morts et permettant leur préservation. Pour les chercheurs, il n’existe aucune preuve que des coulées pyroclastiquescoulées pyroclastiques ou des coulées torrentielles volcaniques se soient produites. Dans ce cas, ces deux types de manifestations très violentes auraient en effet largement détruit les corps, les ensevelissant certes rapidement, mais non de façon connectée et en ne préservant ni les plumes ni les organes.
Des petits dinosaures et mammifères victimes d’effondrements de terriers
Au contraire, de nombreux animaux semblent être morts dans leur sommeilsommeil, sans qu’un cataclysme soit venu perturber leur pose. Pour les scientifiques, il n’y a donc qu’une seule explication à ces observations : l’effondrementeffondrement des terriers dans lesquels étaient réfugiés ces petits mammifères ou dinosaures. Une hypothèse confirmée par l’analyse de la granulométrie des sédiments entourant les squelettes.
« Ce qui a été dit à propos de la préservation [de ces fossiles] met en lumièrelumière un important biais humain, explique l’un des auteurs dans un communiqué. Nous avons tendance à attribuer des causes extraordinaires, des miracles, à des événements ordinaires lorsque nous ne comprenons pas leurs origines. Ces fossiles ne sont qu’un instantané des décès quotidiens qui se sont produits dans des conditions normalesconditions normales sur une période relativement brève » !